Une tomate cerise rendue résistante aux potyvirus

L’un des impacts du dérèglement climatique est la prolifération de virus sur les plantes cultivées. Pour réduire l’usage des pesticides et favoriser le déploiement de pratiques agroécologiques, une des stratégies consiste à augmenter la résistance naturelle des plantes aux virus. Des résultats prometteurs, imitant la sélection naturelle à l’aide de la technique d’édition des génomes, sont parus le 30 janvier dans la revue Plant Biotechnology Journal.

Depuis des millénaires, les plantes cultivées sont façonnées par des processus de domestication. Les agriculteurs croisent et sélectionnent de nouvelles variétés, adaptées à des environnements en constante évolution. Bien qu’efficace, ce processus est long. Par ailleurs, le caractère recherché doit être présent quelque part au sein de la diversité de l’espèce à améliorer.

Copier un mécanisme d’une espèce chez une espèce d’intérêt agronomique devient alors un nouvel enjeu. Parmi les technologies disponibles, de nouvelles techniques d’édition du génome des végétaux sont disponibles depuis 2012. Souvent comparée à des ciseaux moléculaires, la technique CRISPR-Cas9 permet de modifier de manière ciblée et précise une région de l’ADN de la plante.

Plusieurs espèces cultivées, dont le piment ou le pois, sont résistantes à des maladies, par exemple causées par des virus du genre potyvirus1. Comment font-elles ? Certains virus utilisent une protéine de la plante pour l’infecter. Cette protéine a en fait deux fonctions : elle est utilisée par le virus et sert également au fonctionnement de la plante. Les plantes qui résistent à l’infection ont acquis des mutations dans le gène qui code cette protéine. Ces mutations rendent l’utilisation de cette protéine par le virus impossible tout en restant fonctionnelle pour la plante. Ainsi, la plante ayant ces mutations résiste à l’infection et pour la plante cela ne change rien !

 

Une nouvelle étude visait à transposer ce mécanisme à des plantes d’intérêt agronomique, en étudiant sa faisabilité chez une tomate cerise. Pour cela, les équipes d’INRAE ont utilisé une approche différente de la méthodologie classique. Elles n’ont pas cherché à inactiver le gène qui rend la plante sensible au virus, mais l’ont modifié pour imiter les mutations responsables de la résistance présentes chez le pois ou le piment.  

 

Pour cela, les chercheuses et chercheurs ont appliqué la technique de CRISPR-Cas9 pour cibler deux régions de ce gène. Ces modifications simultanées entraînent des changements dans la protéine produite par ce gène. Ces changements octroient à la plante une résistance forte à plusieurs virus du genre potyvirus, dont le PVY. Comme c’est le cas des mutations naturelles sélectionnées chez d’autres espèces, ces changements ne modifient ni l’expression ni l’accumulation de la protéine produite par le gène, et n’affectent pas non plus sa fonction.

 

Ce travail constitue une preuve de concept, proposant une nouvelle approche d’édition des mutations précises, visant à reproduire des résistances naturelles chez des espèces sensibles et ainsi limiter l’utilisation de pesticides.

Date de modification : 21 juin 2023 | Date de création : 21 février 2023 | Rédaction : Service de presse INRAE